Presse hebdomadaire

En 2020, les hebdomadaires québécois publient environ 2,9 millions d’exemplaires chaque semaine, comparativement à 3,4 millions en 2019. Cela marque une baisse importante par rapport aux 6,2 millions de 2011. Nous sommes passés de 200 titres à 113, au gré de fusions, de fermetures et de transformations en bimensuels ou mensuels1. Une très grande portion des éditeurs de telles publications a opté pour la gratuité. Elles sont distribuées aux portes des foyers du territoire qu’ils couvrent, le plus souvent dans le Publisac. Mais une personne peut fort bien recevoir de la sorte un journal et ne pas s’y intéresser.

Selon Vividata, en 2021, 34 % des Québécois de 18 ans et plus lisent un hebdomadaire pendant une semaine type, qu’il s’agisse d’une version imprimée ou numérique2. Sur une base mensuelle, la proportion grimpe à 51 %3. Ces résultats sont inférieurs aux moyennes canadiennes (sans le Québec) qui atteignent 42 % dans le premier cas et 56 % dans le second. Un Québécois sur quatre ne les fréquente jamais4.

À titre de comparaison, mentionnons qu’il y a 50 % de la population québécoise qui déclare avoir lu un quotidien hier en semaine (du lundi au vendredi) et 73 % en ce qui concerne l’ensemble de la semaine5.

1. Proportion de lecteurs réguliers des hebdomadaires locaux (lu au cours de la dernière semaine) et de lecteurs au cours du dernier mois, en % de la population de 18 ans et +, Québec et reste du Canada, de 2017 à 2021

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017 (publié en janvier 2018), Hiver 2020, Hiver 2021 et Hiver 20226

Ces taux ont évolué à la baisse par rapport à 2017 : de 19 points de pourcentage au Québec et de 6 points dans le reste du Canada. La situation semble s’être stabilisée au Québec, alors que le lectorat semble en baisse ailleurs. La plus grande popularité observée au Québec en 2017 rejoint celle constatée lors de sondages conduits en 2014 et 1999 par le ministère de la Culture et des Communications du Québec (MCCQ). Selon ces enquêtes, les hebdomadaires régionaux étaient également suivis chaque semaine par environ la moitié de la population7.

2. Fréquence de lecture des hebdomadaires régionaux (formats papier et numérique combinés) du Québec en 2014, selon l’âge

Source : Ministère de la Culture et des Communications ; Les pratiques culturelles au Québec en 2014, 2016.

Les sondages conduits conjointement par le Reuters Institute for the Study of Journalism et le Centre d’études sur les médias attestent également d’un certain déclin. La proportion de Canadiens francophones8 ayant utilisé un hebdomadaire pour s’informer au cours de la dernière semaine est passée de 24 % en 2016 à 22 % en 2017, puis 20 % en 2018, où il est resté stable jusqu’en 2022, à l’exception d’une brève baisse à 16 % en 2021.

Que s’est-il produit ces dernières années qui puisse expliquer une telle chute du lectorat ? Et bien, les revenus publicitaires, qui représentent 98 % des recettes du secteur, ont chuté de 27 % entre 2016 et 2020. Une partie des budgets des annonceurs a déserté au profit des moteurs de recherche, médias sociaux et autres plateformes non médiatiques. Il s’en est suivi une réduction de l’offre : le tiers des 168 hebdomadaires régionaux ou de quartiers qu’on dénombrait en 2015 avaient disparu au début de 2020. Le nombre d’exemplaires a diminué de 41 % pendant la période. Le groupe TC Transcontinental qui éditait 62 % des titres a quitté le secteur en 2018. Le propriétaire le plus important en détient aujourd’hui 18 %. Les nouveaux propriétaires possèdent moins de ressources financières pour affronter les moments difficiles. La qualité de ces publications en a souffert. Tout cela explique la désaffection de nombreux lecteurs.

Revenons à l’analyse de la situation actuelle. On ne remarque pas d’écart significatif entre les hommes et les femmes, mais la proportion de lecteurs réguliers augmente avec l’âge, comme cela se constatait dans l’étude du MCCQ en 2014 que nous venons de présenter.

3. Proportion de lecteurs réguliers des hebdomadaires locaux (lu au cours de la dernière semaine), au Québec, en % de la population selon les groupes d’âge de 2017 à 2021

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017 (publié en janvier 2018), Hiver 2020, Hiver 2021 et Hiver 2022.

Quatre Québécois sur dix âgés de 50 ans et plus consultent chaque semaine leur hebdomadaire local comparativement à trois sur dix chez les 25 à 49 ans.

On remarque aussi des différences notables selon la taille du milieu de vie.

4. Proportion de lecteurs réguliers des hebdomadaires locaux (lu hier en semaine) selon la taille des marchés, en % de la population, de 2017 à 2021

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017 (publié en janvier 2018), Hiver 2020, Hiver 2021 et Hiver 2022.

Les personnes qui résident dans un marché comptant moins de 100 000 habitants, comme c’est le cas de 29 % de la population québécoise, sont nettement plus intéressées par ce type de publication. Quatre adultes sur dix y lisent régulièrement le journal local. Celui-ci et la station de radio du milieu sont le plus souvent les seuls médias à y traiter de l’actualité de proximité.  

Le marché le plus populeux est toutefois celui de la région métropolitaine de recensement (RMR) de Montréal, qui comprend un peu plus de la moitié (52 %) de la population adulte du Québec. Les concurrents de la presse hebdomadaire y foisonnent : 6 quotidiens, 6 réseaux de télévision et une trentaine de stations de radio. Cependant, bien peu de ces médias couvrent ce qui se passe dans les différentes localités de la région. Leur attention se porte plutôt sur les sujets qui peuvent intéresser l’ensemble de la région ou même, pour ceux dont le rayonnement est provincial, le Québec en entier. C’est pourquoi le taux de lecteurs réguliers des publications hyperlocales y est un peu plus élevé que dans les marchés de taille moyenne comme les RMR de Québec, de Gatineau, de Sherbrooke, de Trois-Rivières et de Saguenay, quoiqu’il reste beaucoup plus bas que celui des régions moins populeuses, chez qui l’attachement des résidents aux hebdos locaux est fort. Bien que les marchés de taille moyenne aient normalement une plus grande identification communautaire que celui de Montréal, les stations de télévision, les quotidiens et les radios qu’on y retrouve consacrent une bonne part de leur travail journalistique aux sujets locaux. Ainsi, cela explique pourquoi les hebdos y ont moins de lecteurs assidus.

Les enquêtes de Vividata n’abordent pas la question du support employé pour lire un hebdomadaire, contrairement à celles du Reuters Institute for the Study of Journalism et du Centre d’études sur les médias. Il ressort de ces dernières qu’un peu moins des deux tiers (62 %) des lecteurs de langue française n’utilisent que les éditions imprimées. Cette proportion était de 72 % des lecteurs en 2019. Celle du public qui ne recourt qu’au numérique est, elle, en augmentation depuis 2018, atteignant 27 % en 2022.

Mise à jour : février 2022

Notes

[1] Enquête du Centre d’études sur les médias. Hiver 2020. Le nombre d’hebdomadaires était de 120 en 2019.

[2] Vividata Hiver 2022, 18 ans et +. Personne ayant lu un hebdomadaire régional (papier ou numérique) pendant la dernière semaine. Cette enquête a été menée d’octobre 2020 à septembre 2021 (12 mois) dans les marchés principaux et d’octobre 2019 à septembre 2021 (24 mois) dans les marchés locaux. Trois marchés principaux concernent le Québec : Montréal, Ottawa-Gatineau et Québec. Les enquêtes s’adressaient aux personnes de 15 ans et plus. Selon l’enquête réalisée au début de l’année 2022 par le Reuters Institute for the Study of Journalism et le Centre d’études sur les médias, 20 % des Canadiens de langue française âgés de 18 ans et plus mentionnent avoir utilisé un hebdomadaire local ou régional pour s’informer au cours de la dernière semaine. L’échantillon de Canadiens francophones est composé à 93 % de résidents du Québec. Chez les Canadiens anglophones, ce type de publications, appelées community newspapers, rejoint 18 % des personnes interrogées. L’écart avec les résultats de Vividata est sans doute attribuable au fait que cette dernière porte sur de très nombreux produits de consommation alors que celle du Reuters Institute concerne nommément l’information. On peut consulter ces journaux autrement que pour s’informer.

[3] Personnes ayant lu un hebdomadaire régional (papier ou numérique) pendant le dernier mois.

[4] La donnée est de 17 % à l’échelle canadienne. Mentionnons qu’une autre tranche de la population a lu un hebdomadaire il y a plus longtemps qu’au cours du dernier mois.

[5] Vividata Hiver 2022, 18 ans et +.

[6] Les enquêtes ont été menées pendant les périodes suivantes. Hiver 2018 : d’octobre 2016 à septembre 2017 (12 mois). Hiver 2020 : de juillet à décembre 2018 (6 mois) et d’avril à septembre 2019 (6 mois). Hiver 2021 : d’octobre 2019 à septembre 2020 (12 mois). Hiver 2022 : d’octobre 2020 à septembre 2021 (12 mois) dans les marchés principaux et d’octobre 2019 à septembre 2021 (24 mois) dans les marchés locaux. Trois marchés principaux concernent le Québec : Montréal, Ottawa-Gatineau et Québec.

[7] Les enquêtes s’adressaient cependant aux personnes de 15 ans et plus.

[8] Rappelons que l’échantillon est composé, chaque année, à au moins 93 % de résidents du Québec.