Télévision

Un plus grand choix de canaux a permis à la télévision diffusée et distribuée selon les modes traditionnels de gagner en popularité auprès des Québécois de langue française jusqu’en 2011, mais l’écoute décline depuis, manifestement en raison de l’arrivée des services en ligne de type Netflix, YouTube, Club illico et ICI TOU.TV EXTRA.

1. Évolution de l’écoute hebdomadaire de la télévision au Québec francophone (à l’exclusion d’Internet)

Source : Données BBM puis Numeris selon la méthode de l’audimétrie ; période de 15 semaines au printemps pour 2011 et 2017 ; période de 9 semaines pour 2020 (du 6 janvier au 8 mars ; nous avons exclu les semaines suivantes en raison du confinement imposé par les autorités sanitaires pour combattre la pandémie de COVID-19 qui a accru le temps disponible) ; période de 14 semaines à l’automne 2021.

En 2021, les Québécois consacrent 28 heures par semaine à la télévision traditionnelle, soit trois heures de moins qu’en 2020, cinq heures de moins qu’en 2017 et sept heures de moins qu’il y a dix ans. En comparant 2021 à 2011, on constate que le déclin frappe tous les groupes, bien que son amplitude varie de l’un à l’autre. La baisse est particulièrement marquée pour les 12 à 35 ans où l’écoute a fondu d’environ 50 %. La perte est supérieure à la moyenne de 20 % au sein des 35-49 ans (-35 %) et des 2-11 ans (-25 %). Les personnes de 50 ans et plus sont demeurées plus fidèles à leur écran de télé, mais on remarque tout de même une diminution de quelque 15 %. Le temps passé à regarder la télévision oscille entre 13 et 19 heures jusqu’au groupe des 35-49 ans inclusivement, pour ensuite augmenter considérablement, atteignant 47 heures pour les plus âgés.

En moyenne, en prenant en compte l’ensemble de la population, les francophones du Québec sont plus loyaux envers les émissions de la télévision traditionnelle que les autres Canadiens. Ils leur consacrent 9 heures de plus par semaine. Mais une bonne partie de cette préférence est attribuable aux téléspectateurs de 50 ans et plus et, dans une moindre mesure, aux enfants. Pour les autres tranches d’âge, l’attrait des plateformes en ligne proposant des contenus vidéo n’a pas fait moins de dégâts ici que dans le reste du Canada.

2. Écoute hebdomadaire de la télévision au Québec francophone et dans le reste du Canada (à l’exclusion d’Internet), en 2021

Source : Numeris selon la méthode de l’audimétrie ; période de 14 semaines à l’automne.

Car l’écoute de contenus vidéo par Internet, une pratique maintenant largement répandue, n’est pas comptabilisée dans ces données. Selon l’Observateur des technologies médias (OTM), elle représente 3,9 heures par semaine en 2020 à l’échelle des adultes canadiens de 18 ans et +, comparativement à 3,4 heures en 2017, à 3,1 heures en 2016 et à 0,5 heure en 2009 et 2010.

Voyons un peu plus en détail la popularité du visionnement en ligne de divers types de vidéos, comme établie par l’OTM.

3. Pourcentage des Canadiens qui ont visionné des vidéos en ligne au cours du dernier mois, par langue, en 2020

Source : CRTC, Rapports sur le marché des communications – Données ouvertes (décembre 2021).

Sur une base mensuelle (dernier mois) les Canadiens de langue anglaise sont proportionnellement plus nombreux que les parlants français à regarder des productions sur Internet, qu’il s’agisse de contenus concernant le sport, de films, de Netflix, d’une émission de télévision de 30 ou 60 minutes, de nouvelles, d’une vidéo sur YouTube ou sur tout type de plateforme. Cependant, plus la catégorie vise un large spectre de pratiques, plus l’écart s’amenuise. Ainsi, si 54 % des francophones écoutent des films en ligne comparativement à 63 % des anglophones, pour un intervalle de 9 points, celui-ci se réduit à 6 points pour le visionnement de n’importe quel genre de vidéo sur le Web. Il en va de même pour ceux qui recourent à Netflix par rapport à ceux qui puisent chez YouTube. La différence s’élève à 17 points de pourcentage dans le premier cas contre 7 dans le second.

Comment ces pratiques ont-elles évoluées depuis 2015 ?

4. Pourcentage des Canadiens francophones de 18 ans et plus qui ont visionné des vidéos en ligne au cours du dernier mois en 2015 et 2020

*En 2015, l’enquête de l’Observateur des technologies médias ne questionnait pas les répondants quant à l’écoute de Netflix.
Source : CRTC, Rapport de surveillance des communications 2016 et Rapports sur le marché des communications – Données ouvertes (décembre 2021)..

Si l’écoute d’extraits vidéo de sports est demeurée la même pendant la période et que le visionnement de vidéos sur YouTube n’a progressé que de 5 points de pourcentages, la popularité des nouvelles en ligne a gagné 12 points, celle des films s’est accrue de 29 points, et celle d’émissions de télévision de 30 ou 60 minutes a augmenté de 36 points.

Revenons à la télévision en mode traditionnel. Les Québécois francophones sont très fidèles aux émissions produites au Canada (la plupart de celles de langue française sont réalisées au Québec). Ils leur accordent 63 % de leurs heures de visionnement. C’est l’inverse pour les autres Canadiens qui consacrent 57 % de leur écoute aux productions étrangères. Ces chiffres ont trait à l’année 2019-20201. Si l’on exclut du calcul les nouvelles et les sports, les émissions canadiennes ne représentent que 25 % de la consommation dans le marché de langue anglaise comparativement à 55 % dans celui de langue française. Si les créations d’ici ont gagné 3 points de pourcentage ces cinq dernières années dans le marché francophone du Québec, elles ont faibli dans une même proportion au Canada anglais.

Par ailleurs, le plus grand choix de canaux a entraîné un morcellement croissant de l’écoute. La part de l’ensemble des services spécialisés et payants (Vrak TV, RDS, Séries +, LCN, Canal D, Super Écran et autres) auprès des téléspectateurs francophones du Québec, qui était de 30,8 % en 2005, pointe au-delà de 45 % de 2010 à 2020 et atteint 44,8 % en 2021. Le réseau généraliste le plus populaire, TVA, récolte 25,6 % de l’écoute cette même année, une performance similaire à celles obtenues depuis 2010. Radio-Canada occupe la deuxième place avec 15,6 %, ce qui se situe près de la moyenne des dernières années. Ciblant essentiellement un public de jeunes adultes, Noovo emporte 6,8 % du marché pour 2021. Même s’il s’agit d’un gain par rapport aux deux années précédentes, ce résultat est l’un des pires depuis quinze ans. Finalement, Télé-Québec récupère 3,3 % de l’écoute télévisuelle. Soulignons qu’à l’échelle du reste du Canada les parts de marché des services spécialisés et payants canadiens dépassent, à 55 %, celles du Québec francophone. 

5. Évolution des parts d’écoute de la télévision chez les francophones du Québec

Source : Données BBM puis Numeris selon la méthode de l’audimétrie ; période de 15 semaines au printemps jusqu’en 2019, de 9 semaines pour 2020 (du 6 janvier au 8 mars pour tenir compte du contexte de confinement qui a marqué la fin de saison) et de 14 semaines à l’automne 2021.

Notons que la part globale de l’écoute attribuée aux services spécialisés canadiens se répartit entre une centaine de canaux différents. La plupart d’entre eux en recueillent donc une portion infime. Les plus prisés par les téléspectateurs francophones sont LCN qui en obtient 5,8 % et les canaux sportifs RDS qui en récoltent 5 %. Ils sont suivis de RDI, à 3 %, de Séries+, à 2,7 %, de Canal D et de Prise 2, à 1,9 % chacun2. En 2020, selon les calculs du CRTC, les services spécialisés de Québecor totalisent 16,3 % de l’écoute des francophones du Québec, ceux de Bell Média en recueillent 14,3 %. Ceux du groupe Corus/Shaw en reçoivent 8,3 %, ceux de la SRC-CBC 6 % et les propriétés de Remstar 2,9 % 3.

Attardons-nous maintenant à l’utilisation de la télévision pour se renseigner. Près de 70 % des Canadiens de langue française ont écouté un bulletin de nouvelles ou d’autres émissions d’information au cours de la dernière semaine et 52 % mentionnent ce média comme leur principale source4. À ce titre, les chaînes en continu sont désignées par deux répondants sur dix, tandis que trois sur dix ont indiqué les réseaux généralistes. Ces proportions étaient du même ordre lors de la première enquête en 2016. Que l’on soit un homme ou une femme ne change rien, cependant que l’âge joue un grand rôle. La télévision est la source dominante pour environ 22 % des moins de 35 ans, comparativement à 62 % pour les 35 ans et plus. Chez les moins de 35 ans, ce sont les médias sociaux qui arrivent au premier rang avec quelque 35 % des mentions5.

Le revenu familial a pareillement une influence sur l’attrait de la télévision comme principale manière de s’informer : les personnes dont le ménage a un revenu annuel bas (moins de 30 000 $) se situent légèrement en dessous de la moyenne (49 %), celles au revenu moyen (entre 30 000 $ et 99 999 $) se trouvent six points de pourcentage au-dessus de la moyenne (58 %), pendant que celles au revenu élevé (100 000 $ et plus) se retrouvent sous la moyenne, également de six points de pourcentage (46 %)4. La moitié des répondants appartiennent à ce dernier groupe, alors que les deux autres en représentent, chacun, le quart.

L’enquête nous renseigne aussi sur la popularité de diverses sources actives dans le domaine de la télévision utilisées au cours de la dernière semaine. Les chaînes TVA/LCN et leurs pendants en ligne rejoignent 69 % des Canadiens francophones comparativement à 57 % pour Radio-Canada/RDI. L’avantage de TVA/LCN est présent chez toutes les tranches d’âge, à l’exception des 25-34 ans pour lesquels il y a égalité. TV5 et CNN sont mentionnées par quelque 10 % des répondants.

6. Proportion des Canadiens francophones qui écoutent diverses sources d’information actives dans le domaine de la télévision pendant une semaine donnée, 2021

* Portée totale des services tant en mode traditionnel qu’en ligne. Note : Les marques Radio-Canada/RDI, CBC/Newsworld et BBC sont également actives dans le domaine de la radiodiffusion. Source : Enquête 2021 du Reuters Institute for the study of journalism et du Centre d’études sur les médias

Quelque 60 % des répondants qui ont mentionné Radio-Canada/RDI ont eu recours à leurs sites ou applications, soit en exclusivité, soit en combinaison avec les supports traditionnels dont fait partie la télévision. Du côté de TVA/LCN, cette proportion est plutôt de 52 %. Les moins de 35 ans sont plus nombreux que leurs aînés à employer les services en ligne, que ce soit en solo ou en conjonction avec les modes traditionnels. La proportion est de 74 % pour Radio-Canada/RDI et de 60 % pour TVA/LCN.

7. Proportion des Canadiens francophones qui écoutent les diverses sources d’information pendant une semaine donnée, selon le mode utilisé, 2021*

Source : Enquête 2021 du Reuters Institute for the Study of Journalism et du Centre d’études sur les médias.

Mise à jour : février 2022

Notes

[1]. CRTC, Rapports sur le marché des communications – Données ouvertes.

[2]. Données Numeris selon la méthode de l’audimétrie, automne 2021, pour le Québec francophone.

[3]. CRTC, Rapports sur le marché des communications – Données ouvertes.

[4]. Enquête 2021 du Reuters Institute for the study of journalism et du Centre d’études sur les médias. Échantillon de 1017 francophones dont 93 % résident au Québec. Sondage en ligne entre la mi-janvier et la fin du mois de février 2021 auprès d’internautes.

[5]. Hommes et femmes de moins de 35 ans montrent à cet égard un comportement bien différent. Les Facebook, YouTube, Instagram et autres plateformes d’échange sont la source privilégiée pour 41 % des femmes contre 29 % des hommes.